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Pierre-Jean de BÉRANGER

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Pierre-Jean de Béranger 1780-1857 

 

En complément de son article sur « la chanson des émules » à la façon de Pierre-Jean de Béranger, notre Frère Ben AourH nous a fait parvenir différents documents explicitant quelque peu la vie et l’œuvre de cet auteur oublié.

A une époque où Alfred de Vigny, Alphonse de Lamartine et Gérard de Nerval rayonnaient de leurs feux, les « facilités littéraires (Lisette... grisette... amour... toujours...) de Béranger ont terni sa gloire et lui ont interdit le panthéon des Lettres. ».

Mais comme nous le rappelle notre Frère, c'est aussi « faire trop peu de cas de la gracieuse légèreté et de la modestie de ses chansonnettes, aux airs si Français. ».

Redécouvrons cet auteur et... Franc-Maçon, mal ou méconnu.

 

Encyclopédie Larousse

Béranger, Pierre-Jean de

Chansonnier, que le public du XIXe siècle convertit en plus grand poète de l'époque romantique, né à Paris en 1780 et mort en 1857.

 

D'une enfance difficile marquée par la faillite morale de ses parents qui l'abandonnent, le jeune Béranger hérita une ironie irrépressible à l'endroit des hypocrisies sociales et un désir incoercible de revanche qui trouva dans la littérature son aliment et sa fin dans la politique.

Élevé à Péronne chez une vague tante, aubergiste de son état, Béranger fit son apprentissage de la vie auprès d'une clientèle populaire qui réfractait les grands événements du monde - et notamment la Révolution de 1789 - à travers le prisme simpliste des innombrables verres d'auvernat ou d'orléanais désaltérant les bavardages quotidiens.

 

Déjà connu par son talent caustique de chansonnier provincial, Béranger monta à l'assaut du succès de la capitale en juin 1807, et s'agrégea rapidement au cercle des Sans-Souci, association libertaire de jeunes gens désireux de profiter des avantages de la société procurés par l'expansion de la bourgeoisie d'Empire.

Béranger devint ainsi un des protégés de Lucien Bonaparte.

 

Assidu sous les arcades du Palais Royal, fréquentant maisons de jeux, restaurants et cafés à la mode, le chansonnier fut l'intime de Jouy - l'Hermite de la Chaussée d'Antin - et d’Arnault, convoitant désormais une plus officielle reconnaissance de ses talents.

Estimé d’Auger, qui détenait le pouvoir de placer dans les bons lieux du savoir les protégés du pouvoir politique, et devenu lui-même franc-maçon, Béranger fut nommé secrétaire de l'administration de Fontanes en novembre 1811.

Il profita évidemment de cette position pour développer son activité littéraire et se lança dans la rédaction de Chansons qui, dès 1813, connurent un certain succès par leur veine populaire et leur sens avéré de la dérision sociale : Les Gueux, Le Sénateur, le Roi d'Yvetot.

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Illustration de la chanson « Le Grenier »

 

Devenu, la même année, membre du célèbre Caveau de Momus qui rassemblait les épicuriens les plus notables de l'Empire, Béranger révéla sa conversion de chansonnier en poète politique en publiant - dès 1814 - ses premières chansons d'opposition à une Restauration qui lui était insupportable.

Il publia un premier recueil de Chansons en 1815.

Dès lors ses activités littéraires et politiques se lièrent étroitement : Béranger ne cessa de clamer l'usurpation et de réclamer la déchéance des Bourbons.

Tout en se faisant l'ardent promoteur de la légende napoléonienne, il se rapprocha des idées orléanistes.

 

En 1821, la publication en deux volumes de ses anciennes et nouvelles chanson lui fut l'occasion d'un procès devant la cour royale, dont, il se servit - condamné à trois mois de prison ferme à Sainte-Pélagie et 500 francs d'amende - pour accréditer son image d'opposant victime de l'intolérance des survivants de la Monarchie d'Ancien régime.

 

En publiant plus tard Le Sacre de Charles X, Les infiniment petits, L'Ange gardien, Béranger tomba sous le coup d'un second procès en diffamation.

Le 10 décembre 1828, il fut alors condamné à neuf mois de prison ferme à la Force et à 10.000 francs d'amende : son image de victime, plus populaire que jamais, devint celle d'un martyr du pouvoir, auquel les jeunes poètes romantiques libéraux vinrent témoigner leur admiration aveuglée : Hugo, Dumas, Nerval...

Béranger joua indéniablement de cette image et de son audience littéraire dans la montée des revendications contestataires à l'encontre des Bourbons.

 

Présent dans les colonnes du National, il piqua les esprits progressistes par l'ironie avec laquelle il desservait la cause de Charles X, et l'apparence d'adhésion enthousiaste qu'il manifestait à l'égard des thèses républicaines.

Cependant, les Trois glorieuses étant passées, Béranger révéla sa crainte profonde de la République égalitaire en devenant le promoteur décidé du duc d'Orléans.

Ses chansons entonnaient la vieille antienne d'un régalisme fondé non sur la collusion des pouvoirs de la politique et de la religion mais sur l'argument populaire et philanthrope de la collectivité rassemblée des Français.

 

Les années 1830-1848 constituèrent l'apogée de la gloire poétique et politique de Béranger, dont Chateaubriand, Michelet et Lamennais - sans rougir - se firent les chantres... Mais Vigny, considérant la gloire de Béranger comme un phénomène conjoncturel de classe, voyait en lui l'expression de la haine qu'inspiraient en ces temps toute aristocratie de l'esprit.

 

Élu député sous l'éphémère seconde République, Béranger, au nom des mêmes motifs que ceux qui - en 1830 - l'avaient fait pencher vers le duc d'Orléans, donna sa démission et - condamnant à terme la nouvelle République - assura l'accès au pouvoir de Louis-Napoléon.

A l'avènement du second Empire, Béranger passa donc pour un renégat aux yeux des véritables Républicains exilés à Londres.

Il est vrai que Ma République affirmait déjà, en 1821, une certaine conception de la chose publique : J'ai pris goût à la République Depuis que j'ai vu tant de rois. Je m'en fais une et je m'applique A lui donner de bonnes lois. On n'y commerce que pour boire, On n'y juge qu'avec gaîté ; Ma table est tout son territoire ; Sa devise est la liberté.

 

Pensionné du nouveau régime, sur le motif de l'ancienne reconnaissance du neveu de Napoléon à l'égard de l'auteur des Souvenirs du peuple, le chansonnier ne s'évita pas les frais d'une dispendieuse flagornerie dans les dernières années de sa vie publique.

 

La mort et l'enterrement de Béranger pouvaient donner lieu à des mouvements de foule : le second Empire décréta des funérailles nationales qui mirent bon ordre à cette cérémonie.

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Illustration de l’ultime chanson de Béranger parue dans l'édition Perrotin

 

Béranger tomba vite dans l'oubli : les plaisirs du vin, des cotillons, un patriotisme enflé par le verbe, un éternel et facile ressentiment à l'égard de la religion et de la monarchie d'Ancien Régime, un progressisme de façade et une esthétique littéraire définitivement rétrograde dans son esprit et sa forme ne sauraient tenir lieu de viatique inépuisable dans la longue marche des écrivains vers leur postérité.

Dès 1860, au nom même de l'art et de la morale, la cause était entendue : ses contemporains admettaient avoir beaucoup trop surestimé le poète national.

 

Il reste confondant que, quelques années plus tôt, des auteurs tels que Chateaubriand et Lamartine aient pu se laisser prendre à ces apparences qui pourtant avouaient leur prosaïsme pédestre dans les chevilles de la versification et la naïveté de ses formes énonciatives : Lisette, ma Lisette Tu m’as trompé toujours. Mais vive la grisette ! Je veux, Lisette, Boire à nos amours.



Éditions : Œuvres complètes, éd. Perrotin, 1845

 

 

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Les reliures de maroquin rouge doré aux fers des volumes tirés de l'enfer... de la bibliothèque de notre Frère Ben AourH qui note que Béranger reste un auteur réprouvé (un franc-maçon c'est dire !) mais orné !

 

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